06/07/2023 | Partner: Regione Valle d'Aosta
Le pont de Leverogne
Le long du parcours de la Route des Gaules, une mémoire qui refait surface petit à petit…
Témoin de la succession lente des événements, suspendu entre le souvenir des traversées les plus anciennes et l’utilisation actuelle, ce pont constitue encore aujourd’hui la porte d’accès à l’ancien village de Leverogne.

Contexte
Niché entre les rives de la Doire de Valgrisenche, là où se développe l’ancien village de Leverogne, le pont a été, au fil des siècles, un passage obligé pour les armées, les marchands et les pèlerins qui, une fois traversée la gorge, pouvaient continuer vers les collines et les territoires transalpins, ou bien descendre dans la vallée en direction d’Aoste.
La persistance séculaire d’un intérêt stratégique situé dans ce lieu, lié à la fois à la traversée de la gorge étroite et à la prédisposition naturelle à l’installation d’activités productives, est attestée par les sources historiques et les évidences archéologiques qui peuvent encore être réellement observées sur le territoire.
En 1365, pour protéger le passage, la chapelle aujourd’hui dédiée à saint Gothard et saint Grat, mais jusqu’en 1672 dédiée à la Nativité de Marie, fut érigée. Après de nombreuses réfections, y compris celles très importantes des années soixante du XVIIIe siècle, est parvenue jusqu’à nous exactement là où il devait se trouver la culée gauche de l’ancien pont romain et adossée au parapet du pont actuel, démontrant le lien étroit entre les deux architectures dans la succession des événements qui ont été les deux protagonistes.
Histoire
Construit par les Romains pour traverser la tumultueuse Doire de Valgrisenche le long de l’itinéraire de la Route des Gaules, le pont était à l’origine en bois, avec des moises et des poutres d’échafaudage encastrés à l’ouest dans le rocher et à l’est dans la pile en maçonnerie dont on peut encore apprécier l’existence, englobée dans les habitations les plus modernes du village. La structure romaine, non sans entretiens et réfactions évidents, demeura active jusqu’en 1691, quand elle a été détruite lors du retrait des armées françaises.
Immédiatement reconstruit en bois, il fut bientôt nécessaire de le remplacer par une structure plus solide et définitive en pierre ; en 1766, la nouvelle structure était déjà opérationnelle, bien qu’elle ait été déplacée un peu plus en aval.
La construction du nouveau pont en pierre a été l’occasion de grands changements, y compris l’agrandissement de la chapelle et sa probable rotation pour permettre un accès direct à partir du parcours principal en raison de la modification de la voirie.
Au cours des dernières décennies, les nouveaux besoins de transport ont conduit à la construction d’autres liaisons en amont et en aval : un pont pour les voitures un peu plus en amont pour rejoindre la Valgrisenche, un pour le chemin de fer, un pour l’autoroute et un pour la route régionale. Des jonctions modernes, bien sûr, mais qui précisent bien l’importance d’un secteur clé pour la viabilité depuis l’époque romaine.
Architecture
En traversant le torrent à environ 18 m de hauteur, avec une seule arcade formée par des voussoirs lithiques, le pont actuel est le résultat de nombreuses réfections et adaptations, bien reconnaissables par les différentes techniques de maçonnerie utilisées.
Le parapet, constitué dans sa partie supérieure d’éléments en pierre « de chant », a été surélevé avec un garde-fou pour l’adapter à une chaussée moderne, beaucoup plus élevée que l’originale, qui couvre le passage de nombreux services souterrains.
Quelques mètres en amont les culées en maçonnerie du pont romain sont encore présentes. Sur la rive droite, au-dessus d’un bloc de fondation, 12 trous de boulin sont visibles, des ouvertures quadrangulaires utilisées pour positionner les moises de la travée unique.